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La compassion ne fatigue pas

La compassion ne fatigue pas[1]

Dans le milieu vétérinaire, où nous côtoyons la souffrance chaque jour, l’empathie et la compassion sont des qualités inestimables et des outils[2] magnifiques. Cependant, il est essentiel de savoir les utiliser de façon sécuritaire.

Mais quel est le problème exactement?

Le problème se nomme, avec plus ou moins d’exactitude, la fatigue de compassion.[3] Que nous confrontions une menace imminente ou que nous ressentions fortement l’anxiété et la douleur d’autrui de manière empathique, notre corps réagit de la même manière. Dans les deux cas, notre corps déclenche la réponse au stress (la fameuse réaction de lutte ou de fuite). Le problème ne réside pas dans le fait de ressentir de l’empathie, mais dans le fait de rester constamment dans cet état. Imaginons que nous soyons en présence d’un client profondément préoccupé par la santé de son animal. Avec empathie, nous partageons l’agitation du client et la douleur de l’animal. C’est ce qui arrive lorsque nous ne faisons pas la distinction entre nos propres émotions et celles d’autrui (l’anxiété du client et la souffrance de l’animal, par exemple). Cela devient si douloureux à l’intérieur de nous que notre souffrance prend toute la place. Nous ne sommes alors plus d’aucune aide et nos actions, automatiques, ne sont pas terriblement efficaces non plus. Notre corps réagit à ce stress et active une série de réactions biochimiques pour nous apaiser. Nous poussons un soupir de soulagement et poursuivons notre journée. Mais si l’on vit de telles situations à répétition, nous nous dirigeons tout droit vers la fatigue de compassion.

Et une solution ?

Gardez votre belle empathie. Il est possible d’être empathique sans s’épuiser. Il faut apprendre à passer de l’empathie à la compassion. Contrairement à l’empathie, lorsque nous sommes en mode compassion, notre corps n’est plus en réaction de lutte ou de fuite. L’animal crie, le client pleure, nous courons dans tous les sens… mais nous ne sommes pas perturbés. C’est ce qui arrive lorsque nous nous souvenons de différencier nos émotions de celles d’autrui.

Apprendre à passer du mode empathie au mode compassion est une compétence qui s’acquière. La prochaine fois que vous ferez l’expérience d’une situation intense émotionnellement, triez vos émotions. Concrètement, c’est comme si nous avions une liste et passions en revue toutes les personnes et les animaux qui partagent votre espace. Nous remettons (mentalement) à chacun les émotions qui lui appartiennent. Qui est anxieux et en détresse? Le client. Qui hurle et souffre? Le patient. Qui répond à leurs besoins avec toute son expertise et son savoir-faire? Moi. Et nous poursuivons nos tâches du moment. Nous voilà de retour dans le moment présent et disponible intellectuellement et émotionnellement. Même pas besoin de quitter la pièce et d’arrêter ce que nous faisons. À refaire autant de fois que nécessaire. Votre mieux-être vous remerciera.

[1] Le titre a d’abord été utilisé par Dowling (2018). Je l’ai trouvé joli, alors je l’ai emprunté.

[2] L’empathie nous permet de ressentir les émotions de l’autre. En milieu vétérinaire, notre capacité d’empathie nous informe qu’il se vit de la souffrance chez le patient et/ou le client. Puis c’est la compassion qui nous pousse à agir, animés par le désir d’améliorer la situation de l’autre.

[3] Il semblerait que le terme fatigue de compassion ne soit pas exact. C’est l’empathie qui peut être épuisante, mais pas la compassion. Étouffer notre empathie, comme certains le suggèrent, n’est pas une solution saine. De toute façon, il faut d’abord ressentir de l’empathie pour ensuite passer à la compassion. Et c’est dans la compassion que se trouve la solution.

Vous portez un éléphant ? Devenez plutôt son cornac. Le fardeau que nous portons peut parfois nous sembler aussi gros qu’un éléphant. Il pèse lourd sur vos épaules, il s’accroche dans les cadres de porte et il reste coincé dans votre valise d’auto. Au lieu de le porter, pourquoi ne pas le guider? Apprenez à diriger votre éléphant. Devenez pour lui un cornac compréhensif, attentif et patient.

Références

Best, C.O., Perret, J.L., Hewson, J., Khosa, D.K., Conlon, P.D. et Jones-Bitton, A. (2020). A survey of veterinarian mental health and resilience in Ontario, Canada. La Revue vétérinaire canadienne, 61(2), p. 166-172.

Dowling T. (2018). Compassion does not fatigue! Canadian Veterinary Journal, 59, p. 749-750.

Gerstenblatt, P., Rhodes, D. et Ivey, D. (2022). Making the case: Adding a social work perspective to a case study in veterinary practice. International Association of Human-Animal Interaction Organizations, 5(1), p. 1-20

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